J’aime beaucoup participer à des conférences internationales étant donné que cela me donne l’opportunité de voir ce que les autres chercheurs, qui s’intéressent au langage chez l’enfant, font et la manière dont ils s’y prennent. C’était ça au Child Language Symposium! Coventry, qui était autrefois la capitale de l’Angleterre, a subi de graves dommages suite aux bombardements pendant la Seconde Guerre mondiale. Quand nous n’étions pas au symposium, nous en avons profité pour nous promener dans plusieurs sites historiques de la ville. J’ai ajouté quelques images dans ce blogue. De retour à l’Université de Warwick, j’ai été captivée par de nombreuses présentations. Plusieurs d’entre elles m’ont ouvert les yeux quant à l’importance de la cognition et de la résilience dans le développement du langage. J’ai autant aimé présenter et parler de ce qu’il se passe dans la région du monde d’où je viens que les conversations que j’ai eues avec d’autres professionnels venant par exemple d’Israël, de l’Angleterre, de la Russie, de la Pologne et qui sont tout aussi passionnés que moi par ce domaine. Dans les paragraphes suivants, je vais tenter de vous donner un aperçu de ce qui s’est passé au cours de cette conférence de trois jours où il y avait plus de 300 délégués!
Souvent, nous ne pensons même pas à la manière dont les enfants apprennent le langage. Il s’agit de quelque chose que tous les enfants font, et que pour la majorité d’entre eux, ils le font sans éducation formelle. Nos cerveaux sont extrêmement complexes et il va de soi que le langage n’est possible qu’en raison de la façon dont nous percevons le monde, notre façon de penser, notre façon de s’adapter et de notre désir inné de communiquer avec ceux qui nous entourent. Il y a eu de nombreuses discussions fort intéressantes à propos d’enfants sourds qui grandissent en développant leurs propres signes et gestes afin de communiquer avec leurs parents entendants et de la façon dont ils peuvent transmettre un message sans utiliser de mots en raison de leur fort désir de communiquer. Très fascinant! Certains chercheurs se penchent sur la façon dont l’utilisation de gestes peut aider à activer les parties du cerveau qui sont responsables du langage, tandis que d’autres chercheurs s’intéressent plutôt à la manière dont la théorie de l’esprit peut être un ingrédient essentiel dans la recette de l’apprentissage du langage et de la production du langage. Bref, la théorie de l’esprit est la capacité à penser à ce que d’autres personnes pourraient penser et comment cela pourrait influencer leurs actions. Cette théorie de l’esprit est donc très importante pour le développement du langage et de la communication. Ce que je trouve le plus frappant c’est la façon dont les enfants sont si résilients quand il s’agit du développement du langage. Même ceux qui ont beaucoup de difficulté peuvent développer des habiletés langagières adéquates lorsqu’on leur donne la chance. Il est important de s’en souvenir. Ça me rend toujours triste de travailler avec des enfants qui ont des difficultés langagières, que ce soit à l’oral ou à l’écrit. Comment peut-il se faire que pour certains, le langage vienne si naturellement tandis que pour d’autres, il y a une lutte continue? Nous pouvons faire une grande différence. Nous pouvons offrir à ces enfants les outils dont ils ont besoin pour réussir. Parce que les enfants peuvent et veulent réussir. Il y avait de nombreux conférenciers à ce symposium et tous ont essayé de comprendre comment nous apprenons et utilisons le langage et comment nous pouvons aider ceux pour qui l’acquisition d’une langue se fait difficilement. La majorité d’entre eux ont démontré que l’éducation est la clé. Autrement dit, la conscientisation des parents (ou de ceux qui s’occupent d’eux) ainsi que des enseignants à propos de l’importance de la stimulation du langage, de la lecture de livres et de l’interaction avec les pairs. Il a été mentionné à plusieurs reprises au cours de la conférence que chez les enfants bilingues, peu importe les langues parlées, on retrouve moins de mots de vocabulaire dans chacune de leurs langues comparativement aux enfants monolingues. Ce n’est pas une surprise, mais il s’agissait d’un doux rappel de ne pas s’inquiéter lorsque des enfants bilingues n’ont pas les mêmes connaissances du vocabulaire dans chacune de leurs langues que des locuteurs unilingues. Toutefois, lorsque vous additionnez tous les différents mots qu’ils connaissent, ils ont généralement une longueur d’avance. Certaines études qui ont été menées en Europe portaient sur des enfants qui parlent deux, trois et même quatre langues. Certaines ont même démontré des bienfaits potentiels du bilinguisme, comme par exemple, l’apprentissage de plus d’une langue pourrait aider à surmonter certaines des lacunes cognitives qui sont associées aux troubles du langage. En tant qu’orthophonistes, la plupart d’entre nous sommes formés pour regarder qu’aux habiletés langagières des enfants. Toutefois, plusieurs études ont démontré que pour apprendre le langage, les enfants ont besoin d’avoir, entre autres, une bonne mémoire, une bonne attention et de bonnes compétences de traitement d’information (appelées fonctions exécutives). Nous avons besoin de changer la manière dont nous pensons et regarder le langage comme étant un processus d’interaction entre la cognition et le langage. En fait, cela ne fait guère de sens de séparer les deux lorsqu’ils sont interreliés dans nos cerveaux. En regardant ces deux éléments, nous pouvons ainsi mieux comprendre comment les enfants apprennent et comment ils développent leurs habiletés langagières. J’ai été heureuse de voir qu’il y avait quelques présentations (sous forme d’affiches) qui portaient sur le TDAH et le langage. Bien que celles-ci fussent plutôt rares, elles ont toutes montré que la plupart des enfants atteints d’un TDAH ont des difficultés assez importantes au niveau du langage, et surtout lorsqu’il s’agit de compétences socio-linguistiques. Nous avons besoin de travailler avec les enfants qui ont un TDAH, mais ces derniers tombent souvent entre les « craques », et ce, surtout s’ils n’ont pas de faiblesses langagières évidentes. Les habiletés sociales sont extrêmement importantes pour fonctionner et pour être acceptés dans ce monde très chargé. En tant que parents, éducateurs et orthophonistes, nous pouvons aider les enfants à développer leur pensée sociale et des stratégies d’adaptation. Il y a de plus en plus d’outils d’évaluation qui incluent une composante sur l’habileté sociale. Ne l’ignorons pas. Être socialement inepte dans ce monde qui se prête parfois au concept de : « les plus gros mangent les plus petits » peut être déprimant. Comme mentionné dans mon billet précédent, il a aussi été démontré que plusieurs enfants avec un TDAH ont aussi un trouble du langage ce qui les met encore plus à risque d’échec scolaire, de dépression et de ségrégation. Certaines études ont aussi montré que les enfants atteints d’un trouble du langage ont souvent moins d’amis et finissent par avoir des emplois moins payants que les enfants qui se développent typiquement. Je pense que nous pouvons aider à rompre ce cycle... Ce ne sont que quelques-uns des sujets parmi ceux qui ont été abordés dans le cadre de la conférence, mais cela donne un bon aperçu des tendances actuelles dans le monde de l’étude du langage chez l’enfant. Pour faire suite à la demande de certains lecteurs, j’afficherai sur mon site Web, sous l’onglet « Ressources utiles », notre présentation ainsi que quelques-unes des affiches que mes collègues, certains étudiants diplômés et moi avons présentées. Je pense à inviter une auteure pour ma prochaine chronique. Je fournirai plus de détails dès que j’aurai une confirmation! Chantal Mayer-Crittenden, 2015.
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AuteureChantal Mayer-Crittenden, Ph.D., SLP Reg CASLPO Archives
July 2018
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